Entre les pubs pour la Plagne qui inondent les murs de Paris en criant "Vivement la Plagne !" (après deux trois phrases incompréhensibles dont mon pote dirait qu'elles ont été écrites par des publicitaires qui avaient trop forcé sur la fumette) et le catalogue Le Noël enchanté des jouets (sic.) des Galeries Farfouillette que j'ai reçu il y a une semaine dans ma boîte aux lettres, je ne sais plus où donner de la tête. Aux dernières nouvelles, l'hiver dans notre hémisphère commence le 21 décembre et Noël est le 25 décembre. J'ai eu beau creuser mon calendrier, je n'en vois pas trace le 31 octobre. Voyons... petit exercice de calcul mental rapide, Noël c'est dans…30+24=54 jours. Cinquante-quatre. Y'a 365 jours dans une année, 54, ça en fait un peu moins d' 1/7ème. C'est énorme non ? C'est comme si on passait un jour sur sept à penser à Noël. Genre, on dirait que tous les mardis, on prépare Noël. Le premier mardi de mars on sort les guirlandes, le deuxième mardi de juillet on arrose le sapin, et le troisième mardi de septembre on commence la crèche.
Je me sens vieille, tout à coup. Quand j'étais petite, et que le Père Noël daignait encore m'octroyer ses largesses, il y avait ce moment magique où je faisais ma liste de cadeaux. "A la" Boris Vian, vous savez… "une bicyclette, des patins à roulettes, un aspirateur et une motte de beurre". J'envoyais, poste restante au Pôle Nord, et quelques jours plus tard, le 25 décembre, ou même le 24 au soir, j'entrais dans le salon, et près de la cheminée, tout près de mes souliers, y'avait plein de paquets. Des rouges, des dorés, des ficelés et des tordus, bref de quoi rêver pendant au moins cinq minutes, le temps de se précipiter pour arracher le papier. J'y croyais dur comme fer, au Père Noël. Je le détestais et l'adorait tour à tour, parce qu'il avait oublié l'aspirateur, parce qu'il avait pensé aux patins à roulettes. Bref, il était de ces figures qui construisent une jeunesse. Mes petits cousins sont aujourd'hui certains que Noël est une course de longue haleine (deux mois, au bas mot) pour convaincre leurs parents de leur acheter le dernier Spiderman en latex coloré...
Quant à l'hiver en automne, je vous passe la critique facile des tomates bien rouges et des framboises pas mûres que l'on trouve encore sur les marchés blanchis par la neige en plein mois de février, ou les collections d'hiver (pulls à col roulés et chaussettes de laine pure) qui envahissent les magasins en plein mois d'août. Il fut un temps où on ne mangeait des cerises que cueillies sur l'arbre au mois de mai s'il faisait chaud, où le ski était une joie de vacances d'hiver. Mes petits cousins (toujours eux) sont infichus de vous dire à quelle époque poussent les tomates ou les endives, et sont bien incapables de dire quand commencent les saisons. Soit dit en passant, j'ai dû googler l'hiver pour être sûre de la date, c'est désolant.
Enfin, le plus à plaindre, dans l'histoire, c'est certainement le Père Noël. Moi qui était persuadée que le Père Noël avait un chouette boulot ! A mon avis, il doit plutôt le détester, son job, si on lui sucre ses 51 semaines de vacances syndicales. Si on commence à le solliciter 54 jours avant Noël, (et encore, je m'en rends compte aujourd'hui, mais je suis sûre que ça dure depuis au moins une semaine, cette histoire…), il va péter les plombs. Et là, que va t'il se passer ? Il va peut-être se mettre en grève, ou faire péter le Pôle Nord, et on sera submergé par la fonte des glaces (... et y'aura plus de saison, CQFD). On aura l'air malin, si le 25 décembre, tout plein de petits enfants se retrouvent sans paquets dorés et se mettent à hurler tous en même temps. On va s'en faire péter les tympans. Sans compter le bazar sur la plage, où les vendeurs de surfs cotoieront les vendeurs de polaires : on achètera des skis et des bâtons en plein été, et des bikinis aux sports d'hiver (enfin, d'été... enfin, je sais plus).
Peut-être que ça nous ferait du bien de prendre conscience que Noël est en décembre, comme le dit mon calendrier et que les fraises ne poussent qu'en été. Ca nous ramènerait à la vraie valeur des choses, non ? Peut-être même que le CAC 40 s'en porterait pas plus mal et que les élections américaines auraient le résultat que j'espère secrètement, tiens.
Mots clefs : Noël - framboises - fumette - fonte des glaces