Photo d'Alexandre Ticono

Photo Alexandre Ticono, tous droits réservés.

- Tu crois vraiment que c'est possible ?
- Oui Javier, j'en suis certain. J'ai quand même un peu plus d'expérience que toi, non ?
- Oui Api. Mais quand même. Je vois mal comment m'y prendre.
- C'est simple. D'abord, tu observes. Tu t'imprègnes, tu jauges. Tu prends ton temps.
- Oui, bon, d'accord, mais j'ai pas toute la vie devant moi.
- La précipitation ne mène à rien de bon. Si tu vas trop vite, tu n'y arriveras jamais.
- Ca roule, je l'observe et ensuite ?
- Ensuite, quand tu as bien cerné toutes les aspérités, tous les endroits où ça pourrait coincer, tu cherches les prises.
- Les prises ?
- Oui, les prises. Enfin disons plutôt, tout ce qui te permet de l'atteindre sans la maltraiter. Tu dois être doux, tu dois faire attention, sinon, elle te résistera.
- OK. Bon, je la connais assez bien, on a passé un bout de temps ensemble, elle et moi.
- Une fois que tu as bien tout mesuré, tu réfléchis à la meilleure façon de l'aborder.
- Oui, ben c'est simple, j'y vais, je l'attrape et c'est plié.
- Non. Tu dois y penser avant. Si tu essaies de l'attraper sans avoir réfléchi, ça ne peut pas marcher. Il faut imaginer chacun de tes pas, mesurer chacun de tes gestes.
- Je ne suis pas sûr d'en être capable.
- On en est tous capable. Si tu as bien joué la scène dans ta tête avant, c'est plus facile. Tu as un avantage. C'est un peu comme un puzzle. Il faut avoir une vision d'ensemble. Sinon les pièces ne s'emboîtent pas. Tu dois imaginer plusieurs scénarios.
- Donc, je mesure. Donne-moi cinq minutes, que je réfléchisse.
- D'accord.
- Ca commence à se dessiner, effectivement.
- Bien. Si tu as vraiment tout pris en compte, ça devrait aller vite. Bien sûr, tu risques d'avoir des surprises, on ne pense pas à tout. Mais si tu as joué avec les pièces, si tu as vu le film dans ta tête, ça devrait aller tout seul. Tu auras les armes pour prendre les bonnes décisions.
- OK, je me lance. Tu m'aides ?
- Je pense que tu peux le faire sans moi. Je suis trop vieux pour ces choses-là.
- J'y vais alors. Armoire, à nous deux ! Tu vas rentrer dans ce coffre de voiture où je ne m'appelle pas Javier Monteiro !

Ce texte constitue ma participation au Dyptique 2.8 d'Akinou, sur une photo d'Alexandre Ticono.