Cela dit, je ne sais absolument pas si 20 000 lieux sous les mers a des tentacules. Donc peut-être suis-je en train de filer des métaphores sans aucune valeur. Live with it. On connaît l'Angleterre pour sa presse poubelle tabloïde. Faut dire qu'ils ont de quoi, les anglais. Avec les tribulations de la famille royale, ils ont de l'or en barre côté gossip. The Sun est un exemple flagrant de ce qui se fait de pire dans le genre. La France a son lot de torchons à rumeurs et scandales, mais autant que je sache, rien d'aussi pourri que The Sun et surtout pas dans le genre quotidien que les gens lisent dans le train. L'Allemagne, en revanche, a, grâce au (à la ?) Bild Zeitung - aparté grammatical, Zeitung=journal est un mot féminin, ce constant changement de genre aura ma peau, c'est sûr - un rival de choix au Sun pré-cité.



Je suis dans le train de retour de Brême et dans le siège de la rangée devant, me faisant face, s'installe un jeune homme charmant. Tout propre sur lui, genre étudiant en éternelle fin d'études ou jeune cadre dynamique en début de carrière, avec lunettes qui vont bien, petite montre chic et chaussures de marche (après tout, c'est le week-end). Plus ou moins la vingt-sept/trentaine, plutôt mignon, je l'imagine assez en train de lire un roman policier, sortir un bouquin de philo ou de management, voire même de droit. Je me serai aussi satisfaite d'un iPod écouté vachement fort que ça te casse les oreilles parce que t'entends juste tsktsktsktsktchakatchak comme si on te battait la mesure au creux de l'oreille à l'aide d'une fourchette sur un plat en alu (désolée pour ceux qui ont les dents fragiles). J'imagine donc. Bernique. Point de bouquin, point de baladeur. Il a sorti le Bild Zeitung -- second apparté grammatical, je me décide pour le masculin en français, après tout, c'est masculin, un journal.

Il faut savoir que le Bild Zeitung est un journal format immense, genre dans le train tu le manges si ton voisin le lit. Difficile donc de le feuilleter sans attirer l'attention. The Sun a au moins la décence d'être au format tabloïd et l'on peut à la rigueur le planquer derrière le siège. Non, là, tout le monde sait et voit que ce gars lit le Bild Zeitung. Ceci dit, je dois être un peu snob sur les bords, je n'ai jamais lu Gala ou Ola! que chez le coiffeur et encore en m'assurant que personne que je connaissais n'était dans les parages.

Mais quand même, je suis déçue. Un mec mignon comme ça, c'est vraiment dommage. Si on ne peut plus se fier aux apparences... Ceci dit, je suis peut-être mauvaise langue, les peut-être ce gars-là est-il un thésard en socio analysant pour les besoins de sa thèse la société allemande à travers sa presse poubelle. Ou un fan de Kempowski. Ou peut-être un ingénieur en pétroléologie (mouais, le mot existe pas et je ne sais pas comment on dit. Science du pétrole ?). Ou alors il prépare déjà sa retraite. Je dis ça parce les (gros) titres à la une sont parlants :

  • 'Drama um berühmte Schrifsteller - Der große Kempowski Krebs' -- Drame pour écrivain connu. Le grand cancer de Kempowski.
  • 'Rente mit 67!' -- la retraite à 67 ans !
  • 'Neue Erdölquelle in der Nordsee entdeckt?' - une nouvelle source de pétrole découverte en Mer du nord ?

Ah ben non, suis-je bête, ça doit être pour la femme dont les seins nus s'étalent en bas de page, qu'il l'a acheté, ce journal. Mais alors, pourquoi il tourne les pages, comme s'il lisait ?

Les allemands m'étonneront toujours.